ORPHÉE&GAINS ♣ Peut-être, oui.

PEUT-ÊTRE, OUI.

Leurs regards étaient rivés sur moi, encore. Je ressentais leur pitié, leur dégoût ou peut-être même cette moquerie incessante. Ne connaissaient-ils pas l’handicap ? N’avaient-ils jamais vu une personne en fauteuil roulant ou avec un bras dans le plâtre ? Étais-je vraiment différent de celle-ci, de cette personne qui semblait si banale ? Il est vrai que mes mains devaient glisser sur ce qu’il se trouvait à mes côtés. Ici, les murs de l’école. La sonnerie venait de retentir, les étudiants étaient déjà sortis. Ou presque. L’heure de midi étant annoncée, il fallait que je trouve un coin des plus tranquilles.

Gainsbourg en perdait la tête. Jamais, il ne comprendra. C’était tellement difficile pour cet homme. Cela perdurait depuis tant d’années, et personne n’a jamais été capable de répondre aux nombreuses questions qu’il se posait. Devait-il vivre avec ces doutes agaçants, et cela jusqu’à la fin ? Il fallait le croire, malheureusement. Mais, il était reconnaissant. Reconnaissant envers les personnes qui souhaitaient lui faire oublier ces points d’interrogations et lui rendre la vie plus facile. Mais à force, Gainsbourg s’en lassait. En effet, il prenait ces aides devenant habituelles comme de la pitié. Un aveugle se trouvant dans une université se doit d’avoir des amis sur qui il peut compter, sur qui il sait qu’au moindre problème, l’un d’eux sera toujours présent.

Ils sont nombreux à être là pour moi, si comme dit, il y aurait un moindre problème. Je ne saurai tous les citer. Filles comme garçons, ils sont tous fidèles et respectueux. Devrais-je me plaindre ? Étant donné qu’ils sont tous adorables, j’attendrai le bon moment pour élever la voix. De cela, j’ai fait des rencontres exceptionnelles dont une qui me tient particulièrement à cœur. Puisque je ne vois plus, je me fis au son de la voix ; Je regarde si celle-ci me plait, si celle-ci m’attire. Il y a quelques semaines, j’ai rencontré une demoiselle, nommée Orphée-Capucine. Un prénom long comme j’apprécie. Au son de cette voix si douce, si alléchante, je l’ai trouvée jolie. N’ayant une guère idée sur son apparence, je m’en tiens qu’à ses paroles apaisantes. Peut-être que je la reverrai. Un jour, peut-être, oui.

En vérité, Gainsbourg avait rencontré Orphée-Capucine lors d’une fin d’après-midi. Souvenirs. C’était la fin des cours, tous les élèves avaient hâte de regagner les chambres en compagnie de leurs colocataires. Le jeune homme attendit que les élèves de sa classe sortent, rangeant le peu qui se trouvait sur sa table. Sortant, le jeune homme ne savait qu’il y avait une foule énorme au niveau de la sortie. La raison de ce rassemblement reste encore inconnue, aux yeux des professeurs. Les affaires scolaires contre son torse, il s’approcha des étudiants, si dangereux pour notre infirme. Bousculant l’un d’eux, cela n’a malheureusement pas été apprécié. Gainsbourg se retrouva par terre. La demoiselle en question accourut et vint les explications entre elle et le malpoli. Et c’est ainsi qu’ils firent connaissance.

Gainsbourg pensa à cette jeune femme, alors qu’il descendait les escaliers menant aux jardins de l’école. Faisant attention de ne pas tomber, il se tenait aux rambardes. Vêtu d’une chemise légère, il se dirigeait vers la somptueuse verdure. Le soleil réchauffant sa peau, il s’arrêta, s’asseyant sur l’herbe verte. Ayant pris de quoi manger, le jeune homme ouvrit son sac. Ses colocataires avaient royalement préparé son déjeuner. Quoi de mieux ? Sortant un sandwich, il en retira un morceau, le dégustant rapidement. Avec tranquillité, il profita du beau temps qui se faisait rare à Wuthering Heights. Qu’importe.

♔ orphée & gainsbourg →
peut-être, oui.

Encore un jour désespérément ennuyant dans la vie d'Orphée. Un de ces jours où elle ne pouvait s'empêcher de tourner en rond en cherchant en vain à s'occuper. Elle se languissait, seule dans sa chambre, ses colocataires ayant toutes foutu le camp elle-ne-savait-pas-où. Elle cherchait comment s'occuper quand elle eut enfin une illumination. Il faisait beau, même d'où elle était, elle pouvait voir le soleil briller dans le ciel. Pourquoi ne pas aller faire un tour dehors ? C'était le moment idéal pour ça. Aussitôt dit, aussitôt fait. Avant de se donner le temps de changer d'avis, elle enfila rapidement un t-shirt des beatles, un short en jean, une paire de ballerines et hop, elle était prête. Oui, Orphée était du genre à se lever très tard quand elle le pouvait, ce qui expliquait qu'elle n'ait pas déjà été habillée à cette heure avancée. Elle traversa l'école rapidement, pour finir par arriver dans les jardins. Elle se demandait si elle devait aller du côté du lac ou s'il valait mieux l'oublier quand elle aperçut Gainsbourg. Un sourire éclaira son visage et elle se hâta pour finalement se laisser tomber dans l'herbe à côté de lui. « Bonjour Gainsbourg » déclara-elle d'une voix douce, consciente que le jeune homme ne pouvait la voir. Il ne pouvait se servir de ses yeux aveugles et elle savait qu'il en éprouvait beaucoup de peine. Elle ignorait si cela avait toujours été ainsi ou s'il fut un temps où il pouvait voir mais elle n'en parlait pas, elle ne voulait pas le blesser. C'était étonnant qu'Orphée puisse être amie avec lui. Elle n'était pas méchante, non, juste quelque peu égoïste et elle n'avait jamais les bons mots. En profonde pessimiste, elle savait écouter mais n'était guère douée pour trouver les mots réconfortants. Pourtant, elle se débrouillait toujours pour s'efforcer de ne pas blesser le garçon quand elle le voyait. Elle s'en serait beaucoup voulue si elle l'avait fait.

Elle avait rencontré Gainsbourg une après-midi qui semblait ordinaire. Il y avait plus de monde dans les couloirs que d'habitude mais cela ne posait pas de problèmes pour ceux qui pouvaient éviter les gens. Gainsbourg n'était pas de cela. Il avait simplement bousculé la mauvaise personne au mauvais moment et celle-ci, qui s'était trouvé être un abruti de première, s'était énervée et le jeune homme avait fini par terre. Orphée détestait la violence gratuite et, voyant qu'il ne se défendait pas, elle s'était douté que quelque chose clochait et elle avait accouru. Immédiatement, elle avait pris sa défense et s'était rapidement expliquée avec cet idiot qui, lassé d'être réprimandé par la blonde, avait pris ses jambes à son cou et ne s'était pas fait prier pour décamper. C'est comme ça qu'elle avait rencontré Gainsbourg. Elle lui avait tendu la main mais il ne l'avait pas prise. Alors, elle lui avait demandé si ça allait et il avait répondu oui sans toutefois la prendre. Elle avait compris que quelque chose n'allait pas et elle avait attrapé sa main d'office pour l'aider à se relever. Quand il avait croisé son regard, elle avait compris. Compris que s'il n'avait pas pris sa main, c'est parce qu'il ne l'avait pas vu, que s'il avait bousculé ce type, c'est parce qu'il n'avait su l'éviter, que s'il ne s'était pas défendu, c'est parce qu'il ne l'avait pu. Ce qu'avait ressenti Orphée n'était pas de la pitié mais une profonde sympathie. Malgré les difficultés de sa vie, il continuait à faire face et à se battre pour s'en sortir. A sa place, il ne faisait aucun doute qu'elle se serait laissée aller. Elle était admirative envers lui, d'une certaine manière. Et s'étant prise d'amitié pour lui, elle s'efforçait de lui rendre la vie plus facile à chaque fois qu'elle le pouvait. Après tout, elle l'appréciait sincèrement et elle ne voyait pas pourquoi il aurait eu à vivre plus périlleusement que les autres, déjà que son existence contenait certainement plus de souffrance. Orphée était donc ravie d'être tombée sur lui aujourd'hui et se promit de mettre un peu de bonne humeur dans sa journée.

désolée, c'est pas glorieux u_u